Les femmes assurent l’école à la maison dans 92% des cas, selon une enquête de Félicia auprès de plus de 2000 familles (1). Pour les mamans séparées ou divorcées, ce libre choix est rarement pris en compte par les pères. Justine* nous raconte :
« L’école à la maison est une pomme de discorde avec mon ex, il s’en sert pour me faire du chantage. Mais comme il est incapable de s’occuper de nos enfants, je lui réponds toujours : ‘très bien, puisque tu veux les remettre à l’école publique, c’est toi qui va t’en occuper, tu vas faire tous les trajets.’. Alors il renonce et il me laisse leur faire l’école à la maison. »
Lorsque le conflit s’envenime, les juges donnent quasiment toujours raison aux pères de famille qui souhaitent que leurs enfants soient instruits à l’école, sans tenir compte de la liberté fondamentale de l’enfant et du parent qui a pourtant la garde principale, comme si la scolarisation en école était prioritaire. Ainsi Clémence* témoigne :
« Je souhaiterais faire l’école pour mes deux enfants, mais leur père n’est pas d’accord. Nous sommes séparés, nous avons l’autorité parentale conjointe et j’ai la garde principale des enfants. Il y a d’autres parents séparés qui sont dans cette situation de ne pas pouvoir faire l’école à la maison pour leurs enfants car le juge donne la priorité à l’école et au parent qui fait le choix de l’école. Selon les avocats spécialisés sur l’instruction en famille, les juges statuent rarement en faveur de l’instruction en famille en cas de désaccord entre les parents, sauf parfois si l’instruction en famille était déjà leur mode d’instruction ou s’il y a preuve de phobie scolaire ou de difficultés (psychologiques…). Le juge ne prend pas en compte le simple choix d’un autre mode d’instruction par l’enfant ou par un des parents. Il faut prouver qu’il y ait une difficulté importante pour ne pas aller à l’école et pour pouvoir faire l’instruction en famille. Le parent qui s’occupe principalement des enfants n’est pas davantage entendu dans son choix alors que c’est lui qui s’occupe de l’éducation, de l’organisation du quotidien des enfants, des conduites à l’école… Il n’y a pas de prise en compte du choix des enfants en ce qui concerne leur propre mode d’instruction. »
Notre association Liberté éducation se pose donc déjà la question de mener des actions en justice coordonnées pour venir en aide à ces mamans seules, afin qu’on ne leur fasse pas renoncer à leur liberté fondamentale pour des raisons idéologiques, sous couvert de conflit avec les pères. Il faudrait donc faire inscrire dans la loi que le juge des affaires familiales doit laisser la possibilité, même en cas de désaccord du père, d’instruire en famille les enfants dont la mère a la garde principale.
Comme chacun le sait, le régime d’autorisation pour l’instruction en famille du projet de loi principes républicains est en réalité celui d’une interdiction déguisée : le gouvernement a décidé de renvoyer à l’école les 2/3 des enfants instruits en famille. Nous pouvons donc affirmer, à la lumière de ces situations de plus en plus nombreuses qui nous sont partagées, qu’un tel régime fragiliserait encore davantage les mères séparées ou divorcées. Le Conseil d’Etat, dans son premier avis révélé par le rapport Bergeal, a affirmé que cette disposition du projet de loi séparatiste est disproportionnée et injustifiée : le risque d’arbitraire serait alors d’autant plus grand pour ces mères séparées et le contentieux en résultant pourrait devenir de plus en plus important auprès des tribunaux.
Pour aller plus loin :
- Lettre ouverte d’une maman féministe qui pratique l’instruction en famille
- Une liberté fondamentale ne peut être soumise à un régime d’autorisation préalable
- Le régime d’autorisation serait un véritable parcours du combattant !
(1) Source : Fédération Félicia (PDF)