Qu’est-ce qui peut donc réellement pousser le gouvernement à changer la loi sur l’instruction en famille vers une interdiction avec peu d’autorisations ? Les explications d’Elsa Baer (lire ton témoignage ici), trésorière de notre association Liberté éducation.
1. L’Etat craint que l’IEF soit un terreau de séparatisme religieux
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- La loi actuelle prévoit pour les enfants en IEF des contrôles tous les 2 ans par la mairie, et tous les ans par l’éducation nationale, ces contrôles pouvant être réalisés au domicile des enfants. Les familles déclarées en IEF sont donc parmi les familles françaises les plus contrôlées. Si un enfant ou sa famille sont suspectés d’être radicalisés, l’Etat peut obliger l’enfant à retourner dans le système scolaire proposé par l’éducation nationale sous 15 jours (1).
- Le projet de loi n’autorisant l’instruction en famille que dans peu de cas, il est à prévoir que de nombreux enfants ne soient plus déclarés, ni en établissement scolaire, ni en instruction en famille, ils seront encore moins contrôlés. Le projet de loi ne répond pas à cette crainte.
- Pour les enfants « hors radar », déclarés ni en IEF, ni en établissement, rien n’est prévu, ni dans la loi actuelle, ni dans le projet de loi. Mais on peut penser qu’une rapprochement des données concernant les enfants déclarés à la CAF et les enfants déclarés instruits en IEF et en établissement permettrait de les retrouver.
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Pour les enfants « hors radar », déclarés ni en IEF, ni en établissement, il est déjà prévu, dans la loi actuelle, un contrôle immédiat par les services de l’éducation nationale. Du côté de la mairie, une absence de déclaration est une « infraction pénale qui peut être sanctionnée par une amende du montant prévu pour les contraventions de la cinquième classe. Elle doit par conséquent être signalée au procureur de la République par toute autorité municipale ou académique qui en aura connaissance. Elle peut aussi faire l’objet d’une information préoccupante pour enfant en danger auprès du président du conseil départemental (2).
2. L’Etat craint que le niveau scolaire soit faible en IEF
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- La loi actuelle garantit une obligation de résultats des enfants en IEF, qui sont contrôlés tous les ans par l’éducation nationale. Si l’inspecteur juge que le niveau n’est pas suffisant, il peut exiger un retour à l’école sous 15 jours après un second contrôle. C’est ce qui arrive chaque année à 0,5% des enfants actuellement en IEF. Remarque : les enfants instruits dans le cadre de l’éducation nationale n’ont pas d’obligation de résultats. Ce sont leur professeurs qui ont une obligation de moyens. L’enquête Timss parue en décembre 2020 révèle que les français ont un niveau de maths parmi les plus faibles de l’OCDE.
3. L’Etat a peur du nombre croissant d’enfants instruits en famille
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- Oui le nombre d’enfants instruits en famille augmente. Mais si tel est le cas, peut-être faudrait-il que l’éducation nationale se remettre en question plutôt que d’obliger tous les enfants à revenir dans son giron ? Un Etat qui oblige tous les enfants à rejoindre son centre de formation, alors qu’il affiche des résultats médiocres (étude Timss 2020), n’est-ce pas étrange ? Un état qui oblige tous les enfants à suivre l’enseignement de la République, juste pour imposer la même éducation républicaine à tous, cela est-il acceptable ?
Alors quelle est la vraie raison de cette volonté de changer la loi ?
Sources
(1) MEN (2016). Enquête sur l’instruction dans la famille, année 2014-2015, DGESCO B3
(2) « les cas d’enfants exposés à un risque de radicalisation et repérés lors du contrôle sont exceptionnels » (Vademecum IEF de l’Education Nationale) – cf aussi le paragraphe II.4.1 de ce lien.