L’historien de la laïcité, Jean Baubérot, auquel Emmanuel Macron s’est souvent référé, adresse dans l’Obs une lettre ouverte au chef de l’Etat sur son projet de loi « confortant les principes républicains » pour lutter « contre le séparatisme ». Il y défend la liberté de faire l’école la maison : « Vous tournez le dos à Jules Ferry en voulant interdire cette liberté, que la loi permet déjà de ne pas laisser sans surveillance. »
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Jean Baubérot rappelle aussi Ferdinand Buisson, directeur de l’Enseignement primaire en France de 1879 à 1896, nommé à ce poste par Jules Ferry, défendait lui aussi la liberté d’éducation. Extraits.
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Tant que l’on n’acceptera pas une dialectique de la proximité et de la distance, tant qu’on n’aura pas intégré culturellement que la République est « indivisible » sans être « une » pour autant, alors on courra droit vers la catastrophe et les prophéties autoréalisatrices d’une détérioration de la situation feront florès. Il serait pertinent de se rappeler ce qu’écrivait Emile Durkheim à propos de l’intégration : elle est nécessaire pour faire société et éviter l’anomie, mais une intégration trop complète, unilatérale se retourne contre la société elle-même en transformant ses citoyens, ses groupements en membres passifs, en atrophiant et en rigidifiant le social.
Si, 85 000 élèves suivent les cours d’Elco (l’enseignement des langues et des cultures d’origine, ndlr) en dehors de tout contrôle, moins de 50 000 sont instruits à domicile (63.000, d’après les dernières chiffres de l’Education nationale, ndlr). Vous tournez le dos à Jules Ferry en voulant interdire cette liberté, que la loi permet déjà de ne pas laisser sans surveillance (les lois et décrets de 1998, 2007, 2009 et 2016 donnant une « attention particulière » au respect du « socle commun de connaissances, de compétences et de culture »). Prenez garde. Vous avez, dans votre hommage à Samuel Paty, cité un beau texte de Ferdinand Buisson : « Pour faire un républicain, il faut prendre l’être humain si petit et si humble qu’il soit […] et lui donner l’idée […] qu’il ne doit ni foi ni obéissance à personne, que c’est à lui de chercher la vérité et non pas de la recevoir toute faite d’un maître. » Il aurait été incongru, là, de préciser le contexte de cette citation. Pourtant il est éclairant. Buisson s’exprime au Congrès de 1903 du Parti radical, pour défendre la liberté de l’enseignement contre les partisans d’une école laïque obligatoire pour qui, « faire des républicains » consiste à enseigner « le credo de “la Déclaration des droits de l’homme” ». Buisson ne célèbre pas l’école laïque, il adresse une mise en garde aux laïques autoritaires, car à cette époque, comme aujourd’hui, plusieurs conceptions de la laïcité s’affrontaient.
Buisson fut mis en minorité, mais qui se souvient aujourd’hui de Lintilhac, son vainqueur ? Et le monopole de l’enseignement laïque échoua, au Sénat, grâce à Clemenceau. « Vous rêvez de l’Etat idéal » et, au nom de ce rêve, déclara-t-il, vous bâtissez « l’omnipotence de l’Etat laïque » qui est « une tyrannie. […] Je ne suis pas de ce pontificat ! […] Nous sommes tous faillibles. » Et « le Tigre » de plaider pour « la liberté dans la diversité » avant de conclure « s’il pouvait y avoir un conflit entre la République et la liberté, c’est la République qui aurait tort ». A méditer !
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