C’est le sens de l’amendement de suppression de l’article 21 déposé par la sénatrice Sylviane Noël (Haute-Savoie). Un texte éloquent !
Le présent projet de loi mentionne dans son article 21 l’obligation de fréquenter un établissement d’enseignement public ou privé, limitant ainsi l’instruction scolaire à domicile aux seuls impératifs de santé.
La liberté d’enseignement est un droit constitutionnel qui, pour être effectif, implique l’existence de l’instruction en famille.
Ce mode d’instruction existe depuis toujours, et se fait dans le strict respect du cadre légal en lien étroit avec les services de l’Education Nationale.
Les parents qui ont opté pour cette solution offerte par notre Constitution, sont intimement attachés aux valeurs défendues par notre République : liberté, égalité, fraternité, et les respectent scrupuleusement.
L’article 371-1 du Code civil définit l’autorité parentale comme « ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant. Elle appartient aux parents jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne. Les parents associent l’enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité.
L’équilibre juridique entre les droits de l’enfant, le droit des parents et le droit de l’Etat implique le maintien de l’instruction en famille sous déclaration.
En outre, les enfants qui apprennent à domicile sont loin d’être « hors radars » puisqu’ils doivent annuellement assurer une déclaration auprès de leur mairie de référence ainsi qu’auprès de l’inspection académique.
Ces contrôles sont réalisés de manière à vérifier que l’instruction donnée est compatible avec l’état de santé de l’enfant et d’autre part s’il a acquis les différentes compétences relatives au socle commun de connaissances.
Sans constat effectif de ces bases, une injonction de scolarisation est alors émise.
De nombreux chercheurs se sont portés sur la question des risques liés à l’instruction en famille en matière de radicalisation. Leurs conclusions sont sans appel et unanimes : il existe des cas, mais ils sont rares et largement minoritaires.
Mais à ce jour, aucune preuve de lien entre l’instruction en famille et la radicalisation n’a été donnée.
L’article 21 dans l’état actuel de sa rédaction ne saurait supprimer totalement le risque de séparatisme et d’écoles clandestines. En effet, l’instruction en famille est déjà largement contrôlée, la loi offrant déjà de nombreux moyens efficaces qui luttent activement contre toutes formes de dérives.
L’école n’est pas un lieu de réjouissance, d’épanouissement et de pleine réussite pour tous les enfants.
Ce mode d’instruction est un choix de vie qui ne vient pas en opposition à l’école de la République, bien au contraire. Il en offre simplement une alternative, parfois nécessaire, dans le strict respect du cadre légal, lorsque certains enfants, porteurs de particularités cognitives (TDAH, HPI …) ou victimes de souffrances (harcèlement) ne peuvent trouver réponses à des besoins qui leurs sont spécifiques.
Il est nécessaire que soient pris en compte tous ces enfants qui sont en souffrance à l’école. Scolariser de force un enfant qui a subi ces problématiques s’apparente à une violence psychologique.
28 % des jeunes sont concernés au cours de leur scolarité par la phobie scolaire. C’est un problème conséquent et non négligeable.
En 2013, une enquête de l’Éducation nationale faisait état de 700 000 élèves victimes de harcèlement en France (Source enquête victimisation 2015 –DEPP).
Le 12 octobre 2019, dans le Parisien, Jean-Michel Blanquer annonçait : « 20 à 30 incidents graves par jour » et prévoyait de publier les chiffres de la violence scolaire département par département.
En l’état, les dispositions de cet article, si elles sont adoptées, porteront directement atteinte au bien être psychique et physique de milliers d’enfants, mais aussi au droit des familles à faire disposer à leurs enfants d’une éducation adaptée à leur situation.
Lors d’une précédente audition au Sénat, le Ministre de l’Education reconnaissait lui-même que la liberté d’enseignement à domicile avait un fondement constitutionnel puissant, tout comme l’a rappelé le Conseil d’Etat dans sa décision 406150 du 19 juillet 2017.
En date du 4 février 2021, la Commission Nationale Consultative des Droits de l’homme a rendu un avis défavorable sur le texte et a demandé que soit abandonné l’article 21 afin de rester sur un régime déclaratif. Elle recommande en outre, en ce qui concerne le choix fait par les parents de l’instruction en famille, d’en rester au régime déclaratif et de mettre en œuvre les contrôles déjà prévus par la loi.
Dans notre pays où la démocratie règne en maître, la liberté doit rester la règle et la restriction, l’exception. C’est la raison pour laquelle cet amendement propose de supprimer l’article 21 du présent projet de loi afin de pouvoir continuer à faire bénéficier à de nombreuses familles de l’assurance que leur liberté d’instruction garantie par la Constitution, ne sera jamais atteinte.