C’est avec une certaine tristesse que Liberté éducation a appris connaissance des décisions rendues hier 24 mai 2023 par le tribunal administratif de Toulouse concernant les demandes d’autorisation de vingt-deux familles pour l’année en cours.
Le tribunal administratif, après avoir statué dans le cadre du référé suspension, était appelé à statuer au fond, après conclusions du rapporteur public et compte-tenu de la jurisprudence déjà fixée par le Conseil d’Etat.
Liberté éducation avait déploré il y a quelques semaines le traitement expéditif des demandes de ces 22 familles qui n’avaient disposé à l’audience, d’aucune possibilité de s’exprimer via leur conseil.
Chaque situation est distincte, chaque famille dispose de particularités qui justifient une situation propre à l’enfant. Il n’est pas acceptable que la juridiction administrative traite de manière expéditive ces dossiers qui sont particulièrement sensibles et douloureux pour les familles. C’est pourtant ce qui est arrivé, après ce traitement expéditif de décisions de rejet sans aucune prise en compte de leur situation propre.
C’est non seulement le rectorat mais aussi le tribunal administratif de Toulouse qui persistent dans une interprétation extraordinairement restrictive de la loi et de la jurisprudence. L’intention même du législateur est totalement niée. Lors des débats parlementaires, non seulement les députés et sénateurs mais également les représentants du gouvernement assuraient que les familles qui proposaient un projet éducatif de qualité ne seraient pas inquiétées. C’est tout le contraire.
Ainsi la rapporteuse du projet de loi, Mme Anne Brugnera, déclarait notamment : « Tous les parents qui pratiquent l’instruction en famille dans des conditions satisfaisantes le font pour leur enfant. Ils n’ont pas besoin de motiver leur décision, qu’ils justifient simplement par un motif de convenance personnelle, mais s’ils ont choisi l’instruction en famille, c’est bien pour leur enfant ! Il suffit de discuter avec ces parents pour constater à quel point ils ont adapté leur projet éducatif à leur enfant. […] Le quatrième motif inclut donc les dimensions auxquelles vous êtes attachés. L’instruction en famille part de l’enfant, mais s’appuie naturellement sur le projet pédagogique […]. Tout enfant est particulier. »
Précisons aussi que l’académie de Toulouse est l’académie de France la plus restrictive, avec 90% de refus des nouvelles demandes d’instruire en famille selon les chiffres du ministère, en tête de nos palmarès.
Liberté éducation continuera à se battre pour que la jurisprudence tienne compte de l’intention du législateur et de la situation des familles. Jamais le législateur n’a entendu restreindre à ce point l’instruction en famille en la réservant uniquement à des cas dans lesquels la scolarisation serait impossible. Les familles qui font des demandes d’autorisation pour l’année 2023-2024 se trouveraient alors en grande difficulté, notamment en raison de la fin des dérogations.
Il est plus que jamais urgent de modifier la loi. Dans ces conditions, Liberté éducation veillera à ce que l’amendement de compromis voté par le Sénat puisse être adopté par l’Assemblée nationale. Cet amendement (article 2 bis du projet de loi École de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité) permettrait en effet aux familles de déposer des demandes d’autorisation en cours d’année pour l’ensemble des motifs et de bénéficier d’une autorisation dès qu’un contrôle favorable pour l’année précédente existe. La loi actuelle limite drastiquement les possibilités de démarrer une démarche d’instruction en famille à tout moment de l’année, même en cas de harcèlement scolaire, alors qu’il s’agissait d’une véritable planche de salut pour les victimes, le temps pour elles de reprendre pied.
De plus la loi pour l’école de la confiance de 2019 obligeant l’instruction dès 3 ans a encouragé de nombreuses familles à se lancer dans l’instruction en famille, familles qui se trouvent désormais prises en étau avec la nouvelle loi qui place cette liberté fondamentale des parents, premiers éducateurs de leurs enfants, sous régime d’interdiction déguisée.
Lueur d’espoir qui se lève à l’horizon, les conclusions du rapporteur public de la Cour administrative d’appel de Nantes allaient dans un sens beaucoup plus libéral, tenant compte des arguments portés par notre avocat-partenaire, Me Antoine Fouret du cabinet La Norville. Délibéré le 9 juin.
Nous luttons pour une juste cause, celle de nos enfants, et tôt ou tard nous finirons par l’emporter !